lundi 22 décembre 2014

Noël, la fin, les armes

Ai!
Noël approche et au Nord les Inuits le célèbrent en grand ainsi que le jour de l'an. L'année passée j'avais participé aux célébrations du nouvel an donc cette année, je voulais voir celles du jour de Noël (et, on doit donner l'une des deux fêtes comme disponibilité)
La ts pas sure 
Mes collègues ont organisé un party de Noël pour les employés du nursing et d'autres partenaires de travail avec beaucoup de nourriture, des jeux et des prix. J'ai pu goûter à un petit oiseau appelé Aqiqqiq en inuktitut mais lagopède en français. C'est un oiseau qui se promène dans les alentours et qui est assez bon.  Il y avait également une parade à l'école et tout les organismes du village étaient invités à participer. Le but était de se déguiser, déguiser l'auto de service et se promener dans les alentours. Tout ça pour pouvoir gagner une statuette qui aurait pu être fièrement affichée dans notre bureau pour un an attestant que notre organisme avait été le 'meilleur' selon la population. Pour moi qui n'aime pas tant Noël, j'avais parfois l'impression d'être le Grinch qui aurait atterri à Chouville. Bref, mon enthousiasme de Noël étant restreint, j'ai été contente que des circonstances nous empêchent de participer à la parade...
maison de Puvirnituq
À Puvirnituq l'année dernière il y avait également un concours des maisons les mieux décorées. Durant le temps des fêtes à Umiujaq, les policiers en partenariat avec la municipalité émettent une interdiction de commander de l'alcool durant les fêtes. C'est justement pour éviter qu'il y ait trop de dérapages mais ça ne veut pas dire qu'il n'y aura pas d'alcool dans le village, la contrebande existe. La COOP offre également des rabais chaque jeudi du mois de décembre pour favoriser la consommation. Les gens du village se lèvent très tôt pour profiter de ses rabais. À Umiujaq, il y a eu des rabais de 20%, 30% à date mais il paraît qu'il y parfois des rabais plus grands dans d'autres villages. La folie de la consommation à Noël est parvenue jusqu'au Nord et, malheureusement on m'a soufflé à l'oreille qu'en janvier, les services sociaux auront à éponger diverses problématiques liées au fait que certaines personnes dépensent trop et se retrouvent sans le sou.

on mange à terre why not?
jeux
On se rappellera que les inuits mangent encore souvent de façon traditionnelle donc, au sol. Aussi, particularité intéressante que j'avais déjà abordé probablement, en général les inuits ne parlent pas en mangeant ou si peu. Tout le monde se tait et mange. Fouillez-moi pourquoi, c'est comme ça .Le temps des fêtes est un temps ou il y a beaucoup de jeux entre les inuits, des jeux d'habileté, des drôles de jeux mais, qui sont pris très au sérieux. À partir de demain, il y aura des jeux chaque soir sauf dimanche au centre communautaire et tout les gens du village sont invités à participer et à compétitionner... Dans l'ancien temps, les célébrations de Noël duraient un mois et demi et maintenant elles sont réduites à deux semaines.  Un grand festin a également lieu le 25 décembre dans chaque village et toute la communauté y est invitée. J'irai faire un tour, puis je prendrai l'avion quelques jours plus tard pour retourner vers mon chez moi ou je passerai le jour de l'an et le mois de janvier.

Dans un autre ordre d'idée, les inuits sont de grands chasseurs mais qui dis grands chasseurs dit beaucoup d'armes dans le village. Un enfant à été atteint par balle cette semaine par une balle perdue d'un jeune chasseur. Qu'on se rassure, l'enfant est sain et sauf et il y a eu plus de peur que de mal. C'est arrivé il n'y a pas si longtemps à Salluit et Ivujivik également mais il s'agissait de jeunes hommes et le dommage fut beaucoup plus grand. Les armes sont bien présentes dans toute les maisons, parfois entreposées sans aucune sécurité. Il est prouvé que la présence d'armes dans une maison augmente le risque de suicide et d'homicide. Venez mélanger ça avec la détresse et la violence présente au Nord et c'est un explosif mélange. Je me souviens d'une intervention conjointe avec un policier que j'avais beaucoup aimé. Le jeune que j'étais venue évaluer pour des idées suicidaires voulait le faire avec un fusil et il y en avait des tonnes dans sa maison. Devant mon insécurité à le renvoyer chez lui malgré le fait qu'il n'était plus activement suicidaire, le policier lui avait proposé de venir avec lui pour sécuriser les armes de la maison. Ils ont fait ce travail ensemble et le jeune a rappelé le policier quand il s'est rendu compte qu'une des armes n'avait pas son propre dispositif de sécurité. La théorie des petits pas, j'y crois. C'est en aidant à changer certaines habitudes qu'on peut apporter des changements à long terme mais, c'est un travail de longue haleine.

Je termine ce séjour et ce message sur cette entrevue de Widia Larivière de Femmes autochtones du Québec que je vous invite à regarder parce que j'ai parlé souvent de ce sujet sur ce blog mais bon pourquoi ne pas répéter? Je reviens au nord fin janvier mais mon expérience tire à sa fin...
Atsunai!






mercredi 10 décembre 2014

Les infirmières du Nord

Ai!
coucher de soleil sur l'Hudson
Cette semaine la DPJ d'Umiujaq qui est voisine des services sociaux a reçu des dons de vêtements et autres cossins. Elle a reçu plus exactement 28 boîtes et pas des petites boîtes, des grosses. Imaginez-vous donc que le lendemain, il en restait 5-6. Il fallait voir la bâtisse envahie par les gens de la communauté pour comprendre que c'était plus que bienvenu comme don. Je ne sais si ces dons sont reliés au temps des fêtes mais on soulignera quand même que la pauvreté ici comme ailleurs au Canada est présente à l'année longue... mais bon on le savait déjà. 

Une chose importante à savoir sur les petits villages de notre côte comme Umiujaq, Ivujivik, Akulivik c'est que les infirmières et plus rares infirmiers sont ce qu'on appelle des 'infirmières de brousse'. En fait, la plupart des infirmières au Nord ont souvent un rôle élargi mais il est encore plus grand en petit village. C'est à dire qu'elles font oui des soins infirmiers mais un peu n'importe quoi aussi. Le 'rôle élargi' qu'elles obtiennent en venant ici est aussi relié à beaucoup d'autres responsabilités qui n'ont rien à voir avec les soins infirmiers classiques.

l'allée des maisons grises
Par exemple, quand la TS qui vient d'arriver (moi) s'embarre dehors en laissant ses clés à l'intérieur c'est l'une d'entre elles qui va venir essayer un paquet de clés en plein blizzard pour essayer d'en trouver une autre qui marche. Si cette même TS pète la porte d'une laveuse du logement d'Ivujivik, elles vont lui dire que ce n'est pas grave, qu'elles vont juste la changer (elles-mêmes, oui) parce qu'au Nord 'rien de ne répare et c'est plus simple de remplacer'. Si encore la même fille (moi) se brûle avec son four, l'infirmière va faire des soins infirmiers avec elle mais aussi faire un peu plus que juste lui mettre des pansements en la rassurant sur l'évolution de la blessure. 

l'allée des maisons rouges
Certaines apprécient grandement la latitude que le Nord leur donne parce qu'au sud il paraît qu'il faut l'autorisation d'un docteur pour tout, même pour donner une Tylenol. Ici, elles peuvent faire des points de suture, mettre au monde un enfant, administrer les médicaments, intuber un patient et j'en passe. Mais, comme le dit cette célèbre phrase ; 'Un grand pouvoir amène de grandes responsabilités'.

Ces femmes et ces (plus rares) hommes aussi agissent parfois en situation de crise, des bébés qui arrêtent de respirer, des hommes et des femmes qui arrivent et qui sont à un cheveu de la mort,  des tentatives de suicides live ect. Elles en sauvent parfois et d'autres fois non. Parfois, dans les petits villages comme Umiujaq ou il n'y a pas de docteur et qu'elles ne peuvent donner les soins nécessaires, la personne doit être transportée en avion vers l'hôpital de Puvirnituq mais la température ne le permet pas alors elles sont là à attendre et espérer. D'autres fois, elles sont carrément impuissantes et le temps est compté mais, font de leur mieux, avec un docteur à distance au téléphone pour les épauler. Elles ont parfois à vivre avec le regard de la communauté lorsqu'elles n'ont pas pu sauver l'un des leurs... Il arrive que des bébés meurent dans leur bras et elles se sentent coupable et pourtant, tout le monde sait bien que certains bébés au Nord sont très fragiles, presque condamnés avant de venir au monde en raison de la consommation d'alcool ou de drogues de la mère durant la grossesse. Les victimes directes de ces abus sont les enfants eux-mêmes et les victimes collatérales sont ces infirmières qui n'ont pas pu les sauver, les travailleurs de la DPJ qui ont essayé d'aider l'enfant et bien sur la famille et la communauté qui s'est attachée à l'enfant le temps de sa courte présence sur terre... J'écris ceci en pensant à une situation particulière et parce que je trouve important de saluer le travail de ces personnes même si parfois elles m'énervent car certaines sont contrôlantes et pensent qu'elles sont les expertes sur tout! ;)
levée du soleil

Vous savez un jour un médecin m'a dis ceci, il m'a dis depuis que les soins de santé se sont améliorés au Nunavik, cela aggrave certains problèmes sociaux. Comment c'est possible me direz-vous? Ça s'explique par le fait qu'avant notre venue il s'effectuait une espèce de 'sélection naturelle'. C'est horrible à dire mais les gens qui avaient à mourir, mourraient et c'était mieux comme ça. Or, depuis que nous sommes ici, ils ne meurent plus ou en tout cas moins souvent mais ça ne veut pas dire que leur vie ou celle de leur famille est meilleure. La présence de l'enfant gravement handicapé met une pression importante sur l'ensemble de sa famille qui s'épuise et n'a souvent peu ou pas de support. C'est la même chose pour l'homme d'une cinquantaine d'année qui a fait un AVC et qui a eu des pertes cognitives importantes. Sa famille est épuisée et les ressources ne sont pas la. En même temps, ces personnes sont souvent victimes du manque de ressources également au sud mais au nord c'est amplifié par 10! Parfois, en voulant aider, on nuit.

me voyez-vous?

Dans un autre ordre d'idées, j'ai vu mon premier lièvre arctique!! La qualité des photos est pas superbe vu que j'ai zoomé au coton mais bon. J'étais surprise de voir à quel point c'est un animal dodu et grand. Il paraît que c'est le géant de la famille des lièvres. Les inuits l'appellent Ukaliq. On me dit qu'ils sont très présents ces temps-ci dans les alentours du village ainsi que les
renards arctique, leurs prédateurs...
coucou! 
Atsunai!

mercredi 3 décembre 2014

Umiujaq ou de l'autre côté du miroir

Ai!
entrée du village
Il m'est arrivé une chose spéciale en arrivant pour ma première semaine à Umiujaq. Spéciale, pour ne pas dire chiante. Il faut d'abord savoir que quand vous arrivez en tant que remplaçante au Nord on vous met souvent dans un transit en attendant que le logement que vous allez occuper pour votre remplacement se libère. Donc, le moment que j'attendais était arrivé et j'avais déménagé dans mon logement permanent. L'histoire est plus compliquée que ça mais je me suis retrouvée embarrée dehors avec les clés à l'intérieur. Le nursing n'ayant aucune clé de rechange (inhabituel mais causé par le roulement de personnel et le changement fréquent de serrures car certains partent avec les clés) donc, j'étais sans-abris pour un peu moins de 24 heures. On a finalement du briser ma porte pour que j'y entre. Je me suis peignée avec une fourchette, j'ai demandé à un gars qui restait à l'hôtel de m'apporter les petites bouteilles gratuites de shampoing et autres, j'ai dormi dans mes vieux vêtements et, j'ai reçu de l'aide alimentaire...


plage gelée d'Umiujaq
Vous savez quel est l'un des services des services sociaux les plus populaires dans certains villages? C'est le food emergency qui est accordé en priorité aux familles avec jeunes enfants et aux personnes âgées. Le prix élevé des aliments, la difficulté des inuits de faire un budget et les dépenses parfois importantes d'alcool peuvent faire en sorte que des gens se retrouvent devant cette problématique mais, il y a également milles autres raisons. C'est à dire que si vous avez pas d'argent et pas de nourriture vous allez aux services sociaux et, le ou la travailleuse sociale fera donc une évaluation avec vous de vos revenus et de la situation économique qui fait actuellement vous n'avez pas d'argent pour vous achetez de la nourriture. Ensuite, on appelle notre superviseur et il nous accorde ou pas la permission d'aller à la COOP avec la personne et de lui acheter de la nourriture. Attention, le rôle du travailleur social ne s'arrête pas la car il doit essayer de faire un plan avec la personne pour que ça ne se reproduise pas trop souvent et faire la police à l'épicerie en quelque sorte. La personne n'a pas le droit de s'acheter chips, liqueur ou autre junk food. L'argent du centre de santé doit servir à de la nourriture de qualité. Tout ça pour dire que l'espace d'un court instant ce fut moi la 'bénéficiaire' qui a accompagné ma collègue inuk qui refusait de me laisser mourir de faim ou de manger seulement du riz. Je ne me sentais vraiment pas bien de dépendre des autres pour ma subsistance, de ne pas avoir de ressources financières ou matérielles suffisantes et ça m'a frappé combien je ne sais pas comment font la plupart des inuits démunis (et de tout les gens démunis sur la planète) pour vivre comme ça...

plage d'Umiujaq
Dans un autre ordre d'idées, une chose importante à savoir sur le nouveau village ou je fais un remplacement actuellement, c'est  qu'avec Salluit, c'est l'un des pire village niveau voyage. Il y a souvent des forts vents, de la brume, bruine, brouillard et d'autres trucs (vents, blizzards) qui font que le voyageur ou la personne qui a besoin d'un avion que ce soit d'un avion Medevac (urgence médicale) ou d'un simple transport pour aller voir sa famille ne peut parfois pas décoller. C'est du à la position/relief du village. Des vents contraires s'affrontent. J'ai lu que des vents qui proviennent d'une direction entre le nord-est et le sud-est au dessus des collines produisent de la turbulence mécanique au-dessus de la piste. Bref, tout ça pour dire que depuis vendredi dernier c'est la première journée ou il fait 'beau'. Alors, je ne me fais pas d'espoir pour revenir à la date ou je suis censée revenir car mère nature dicte sa loi ici mais, en même temps ; À Umiujaq, on peut découvrir des phénomènes géologiques uniques au monde (Lac Guillaume-Deslisle, Lac à l'Eau Claire, Lac des Loups Marins, Petit lac des Loups Marins). En décembre 2012, le plus grand parc national du Québec, le Tursujuq, fut créé pour la protection de cet immense territoire qui n'est accessible que par avion. Je vais pouvoir aller explorer ça sous peu!

petite maison privée
Il y a quelques semaines, un jeune inuk est mort d'hypothermie dans la toundra des alentours. Il était parti chasser je crois, un blizzard s'est levé ils se sont perdus et l'un d'eux qui restait en arrière et était déjà en état grave d'hypothermie s'est mis à se déshabiller (oui, vous avez bien lu). Je ne savais pas mais quelqu'un en état d'hypothermie sévère adoptera parfois le comportement paradoxal d'enlever ses vêtements. Les personnes peuvent sembler saoules et désorientées complètement. Avant de mourir, elles adoptent parfois des comportements pouvant sembler étranges comme de s'enterrer. Ce n'est pas un comportement encore bien compris mais certains scientifiques pensent que ce serait un mécanisme primitif qui est activé par notre cerveau en dernier recours comme les animaux à sang chaud qui hibernent dans une tanière... Le 'déshabillage paradoxal' s'explique par le fait que le corps veut réduire au maximum la perte de chaleur donc les vaisseaux sanguins se contractent mais s'épuisent à la longue et s'arrêtent. C'est à ce moment que le sang chaud va rapidement des organes vitaux aux extrémités du corps et que la personne est submergée par une vague de chaleur. Elles pensent alors mourir de chaud (avec la confusion) et se dévêtissent... Important à savoir car ce sont des choses qui peuvent arriver n'importe ou au Québec avec les sans-abris à Montréal ou simplement si vous êtes adepte de randonnée et qu'un de vos compatriotes se met à agir comme s'il était saoul...

Jusqu'à présent, Umiujaq est agréable et les gens sont sympathiques même s'il semble y avoir des espèces de clans liés aux familles, à l'origine des gens, et aux institutions dans le village. Une famille détiendrait 'le pouvoir' au sein de la communauté et cela créerait tensions et insatisfactions au sein de la communauté. On dirait une espèce de société secrète ou comme une inuk m'a dit une 'native mafia' où il faut être prudent à qui on parle et de quoi... C'est assez mystérieux pour le moment pour moi alors j'observe et écoute...C'est aussi la première fois que dans la bâtisse oû je travaille je suis la seule Qallunak , ( le nursing est dans une autre bâtisse). À suivre pour la suite...


Atsunai!
selfie avec ma belle capuche!!






mercredi 19 novembre 2014

Nouveau village

Ai!
cascade Peguche
Comme le temps passe vite. Ma dernière publication remonte au premier octobre! J'ai eu des belles vacances et un beau voyage. J'ai mis quelques photos pour égayer l'oeil.....
Je suis à Umiujaq, nouveau village. Quand j'ai su que j'allais y aller, j'étais surprise parce que je n'y suis jamais allée et que ça fait quand même plus d'un an que je fais des remplacements sur la côte de la baie d'Hudson. J'ai donc manifesté mon étonnement (j'ai grogné un peu) et on m'a répondu très gentiment que c'est parce que je semblais m'adapter si rapidement aux villages et que ce n'était pas le cas de tout les remplaçants. C'est un beau compliment et, je crois effectivement que j'ai une bonne capacité d'adaptation qui sera une fois de plus testée. C'est à suivre. C'est une belle occasion également de voir une nouvelle communauté.


Je n'ai pas de préjugés défavorables envers Umiujaq. On m'en a dit beaucoup de bien. On m'a dis que c'était un village tranquille et assez joli. Il y aurait également quelques épinettes! Umiujaq signifie ; qui ressemble à un bateau. Un umiujaq est un bateau inuit fabriqué en peau de morse.  C'est un village relativement jeune qui naquit officiellement en 1986 et qui est aussi relativement petit (444 habitants en 2011). Quelqu'un m'a dis un jour que ce village avait été fondé par les meilleures familles de Kuujuarapik (le village d'en bas) qui désiraient vivre de façon plus traditionnelle inuit et donc se distancer des cris. (Kuujjuarapik est moitié-cri, moitié-inuit).

L'histoire semble un peu plus complexe que cela. C'est à cause du projet de la Baie-James que certains Inuits auraient négocié une clause à l'intérieur de la convention de la Baie-James et du Nord Québécois de 1975 qui prévoyait la relocalisation des inuits de Kuujjuarapik vers un territoire qui ne serait pas affecté par le développement hydroélectrique. Il y eu un référendum en 1982 et oui les inuits on dit oui pour la création de cette nouvelle communauté. Ils auraient même attendu la construction du village dans des tentes durant la construction de 1985 à 1986....!
Je vous raconterai mes impressions sous peu sur le village... À suivre
moi & un requin pointe blanche!
Atsunai!

tortue des Galapagos
lion de mer endormi






mercredi 1 octobre 2014

Fin de 'stretch', baies et aurores

Ai!
Me voici au point le plus haut du Québec et je repart en vacances vers mon monde vendredi.
Je suis arrivée en même temps que la neige mais le pilote a quand même pu atterrir. Les pilotes d'Air Inuit sont souvent surprenants dans le bon sens du terme. Chaque village est différent et, à Ivujivik, ça semble être tranquille, trop tranquille pour moi à prime abord! Je ne pense pas vouloir revenir ici. C'est parfait par contre pour quelqu'un qui aime de grandes périodes de tranquillité (lire ici, ne rien faire). Il est vrai que c'est un petit village avec seulement trois rues donc, il ne faut pas s'attendre à être submergée de travail. La dame qui est permanente ici débute sous peu sa pré-retraite, avis aux intéressés. Il n'y a également pas de travailleur social stable a la DPJ depuis très longtemps, la dernière ayant démissionné récemment. Avec la pénurie de personnel, le centre de santé priorise les villages avec plus de population et Ivujivik est très petit mais joli. Voici deux photos d'un de mes anciens collègues du village en hiver/été.

Avant de commencer mon aventure, j'avais lu un autre blog d'un jeune professeur à Ivujivik. Le lundi matin de mon arrivée à Ivujivik, j'ai appris par hasard qu'il venait de démissionner le matin même et qu'il partirait sous peu. On m'a dit que son absence amènera un grand vide mais, les blancs n'appartiennent pas vraiment au Nord et une faible minorité y restera toute sa vie. Les inuits savent que rares sont les blancs qui passeront toute leur vie ici et qu'une fois le travail terminé ils ne reviendront probablement pas sauf exceptions pour simplement visiter car les prix des billets sont ce qu'ils sont. Les rares qui restent sont ceux qui fondent une famille ici. Quant à moi, mon congé nordique avec mon CLSC est renouvelé depuis juillet pour une deuxième année. J'ai su que je peux le renouveler pour une période maximale de 48 mois (4 ans). Que sera sera, whatever will be will be. Deux des anciens travailleurs sociaux de la DPJ avec qui j'avais travaillé ont démissionné. Il est difficile de travailler pour la DPJ au Nord et le taux de roulement est plus grand qu'aux services sociaux... Éventuellement, j'écrirai sur leurs services en collaboration avec l'un de ceux qui a démissionné...A suivre... (oui, J, c'est de toi que je parle)

J'aime, au Nord, partager l'indignation. Ça me fait du bien de rencontrer des gens qui partagent mon indignation envers ce qui se passe ici (ou ne se passe pas). Je trouve cependant qu'il nous manque d'espaces communs officiels pour échanger, s'indigner et, pas seulement entre étrangers. On le fait dans un souper entre 'expatriés', dans un cadre de porte ou au téléphone mais plutôt de façon imprévue et, rarement de façon productive. 'Seul on va plus vite, ensemble on va plus loin'. Je me met parfois à penser et à rêver a ce qui se passerait si blancs de passage et inuits unissaient réellement leur voix et leur force pour des moyens de pression, des lettres, des pétitions, name it! À suivre...

Je vous parlais des bleuets abondants il y a quelques semaines et c'était aussi la période des red berries (kimminaq) à Akulivik récemment. J'y ai goûté à même le sol de la toundra et une collègue inuk m'a également fait cadeau d'un pot de confiture home made. J'ai trouvé ça très gentil sauf que je dois dire que je préfère les bleuets car le goût des red berries est beaucoup plus fort et presque amer mais c'était intéressant à découvrir. Il y a beaucoup d'autres petits fruits sur le sol de la toundra ; des cloudberries (arpiq), des blackberries (paurngaq) et des bearberries (kallaq). Ces baies ont fait traditionnellement partie de l'alimentation traditionnelle des inuits et des chercheurs se sont penché récemment sur leurs bienfaits. Elles aideraient à la perte de poids, la santé intestinale and insulin sensitivity in diabetics. Je ne suis pas une scientifique mais je suis prête à parier que c'est également plein d'antioxydants... Oh, dans mes promenades dans la toundra, j'ai vu des oies des neiges. C'est une espèce qui se retrouve dans la toundra dès juin mais, qui passe l'hiver en bas. Elles sont jolies et assez craintives.

Ma dernière nuit à Akulivik, le ciel nous a fait tout un spectacle. J'avais rarement vu autant d'aurores sur une si longue période de temps et le ciel était très clair. C'était tout à fait magnifique et, pour une fois, j'ai réussi a prendre quelques photos potables. Il n'est pas facile de prendre les aurores en photos. Elles sont souvent vertes mais j'ai aussi vu des petites traces de mauve. Il y a beaucoup de mythes anciens très poétiques concernant leur existence. De la poussière éjectée par la queue du renard polaire pour les Samis, une partie de balle entre les âmes des morts pour les Inuits du Groenland ou une danse des esprits des animaux pour d'autres c'est tout de même plus amusant que de savoir que c'est simplement l'interaction du vent solaire et de l'atmosphère...

Je serai de retour au Nord en novembre... après un séjour au Iles Galápagos!
Atsunai!

vendredi 19 septembre 2014

Ivujivik, le plus haut village au Québec

Ai!
Mon séjour tire déjà à sa fin et je m'envolerai sous peu vers un village où je ne suis jamais allée. C'est le village le plus haut au Québec (et donc, le plus froid brr!) Voici un documentaire sur le village si ça vous intéresse (et que vous avez la vitesse internet pour!) http://mobile.tv5mondeplus.com/video/12-01-2012/ivujivik-198817/

Vendredi passé, nous apprenions par surprise que le permanent d'Akulivik revenait de son congé de maladie donc déménagement pour moi et changement de village! J'irai donc à Ivujivik qui veut dire «Là où les glaces s'accumulent en raison de forts courants». C'est un tout petit village, le plus petit que je vais avoir visité jusqu'à présent (370 habitants au dernier recensement).

Je quitte Akulivik avec un peu plus d'espoir pour la communauté que la dernière fois ou j'y étais passée comme je disais la semaine passée. Des problèmes ont été soulevés et discutés en réunion cette semaine. Il semblerait selon ce qu'on m'a dit que le maire du village et sa clique sont assez... comment dire poliment... lents à faire bouger les choses ici. Depuis plusieurs années, l'argent pour un gym est disponible mais aucune action n'est effectuée. Ça semble anodin pour les gens du sud mais ici où l'ennui et le manque d'activités en tout genre est flagrant, un gym est très important. Ce n'est qu'un exemple parmi d'autres qui font que les initiatives de certains travailleurs sont découragées, entravées je dirais même par la municipalité qui devrait pourtant collaborer. Je me souviens de cette phrase qui dis «Si vous ne vous occupez pas de politique, elle s'occupera de vous»... À Akulivik, on pourrait dire «Si vous ne vous occupez pas de politique, elle ne s'occupera pas de vous». C'est une histoire à suivre...

Je me rend compte qu'il est parfois de plus en plus difficile pour moi de partir. On dirait que j'oublie de ne pas trop m'attacher. Je m'attache à ce client un peu limité dont je gère l'argent l'espace de quelques semaines et qui nous visite à tout les jours, à cette collègue inuk qui aide tout le monde dans sa famille au détriment de son bien-être ou à cette autre qui vit avec un homme si contrôlant et violent mais qui m'en parle avec un petit sourire comme pour dédramatiser. D'autres villages, je me rappelle cet autre collègue qui mange sans arrêt des brownies et qui trouve toujours à rire quand je lui dis que ce n'est pas bon pour sa santé, de celui qui est tout un chasseur mais qui sait aussi écouter et comprendre les clients mieux que moi, de celle qui voulait m'attacher à une chaise avec du duck tape pour ne pas que je parte. Je me rappelle celle-ci plus âgée qui ne parle pas beaucoup anglais mais qui est toujours souriante et fidèle au poste et qui amène de la banique parfois pour les Quallunaat. Je me rappelle cette cliente dans un autre village qui attend depuis une éternité un placement au sud pour son enfant handicapé et je me demande comment elle va. Toujours partir sans savoir si on va revenir... Je pense aussi à mes gens au sud que je quitte souvent. Ce n'est pas toujours facile d'être prise entre deux mondes.

Je fais ça court, j'ai une valise à préparer! Dans un autre ordre d'idées, si ça vous intéresse, j'ai découvert qu'il y a des tisanes faîtes avec des éléments qu'on retrouve au Nunavik, un mélange d'épices fait à partir d'algues de la région et même des crèmes pour le visage aux algues! Ça peut être intéressant d'encourager ces initiatives commerciales et, par le fait même, découvrir de nouveaux produits. Voici les liens... Le premier décrit comment est né le projet avec les algues ;
http://objectifnord.telequebec.tv/explorer/liste/marees-de-l-ungava/algues
http://www.nunavikfoods.com/index_fr_ca.html
http://www.deliceboreal.com/fr/tisanes/
http://www.ungavacare.com/fr/welcome
Atsunai!



mercredi 10 septembre 2014

L'alcool

Ai!

Saviez-vous que le mythe selon lequel les populations autochtones seraient plus sensibles à l'alcool est faux? Je ne sais pas cependant si cela s'applique pour les inuits car ils n'ont pas les mêmes ancêtres/lignée génétique que les autochtones (les ancêtres des inuits sont les thuléens) mais, on va supposer que c'est probable aussi. Il semble au contraire qu'il se pourrait que les populations autochtones soient moins affectées par l'alcool et  «de même, une forte tolérance à l'alcool est généralement associée à un risque accru d'en devenir dépendant». Donc, pas de prédisposition mais en même temps pas de facteurs de protection non plus (comme les asiatiques) et, comme l’auteur de cet article le souligne si pertinemment, c’est davantage le milieu social et environnemental difficile qui prédispose…http://www.lapresse.ca/le-soleil/vivre-ici/la-science-au-quotidien/201409/06/01-4797872-le-mythe-de-leau-de-feu.php utm_categorieinterne=trafficdrivers&utm_contenuinterne=cyberpresse_B9_sciences_1817902_accue

Il est intéressant que de constater qu’en ce qui concerne l’alcoolisme, deux visions peuvent s’affronter soit celle médicale ou soit celle sociale, environnementale. En ce qui me concerne, j'aime mieux penser que l’alcoolisme est le symptôme et non la cause. Cependant, il est certain qu’il est plus facile de dire que c’est en raison d’une particularité génétique ou physiologique que quelqu’un ou une population est alcoolique et non en raison de son environnement car, il est beaucoup plus difficile d’apporter des changements sociaux. Cela amène la majorité des gens incluant certains autochtones à penser qu’ils sont alcooliques parce qu’autochtones et donc prédisposés à l'être. C’est très pervers également car ça peut devenir un élément identitaire. Un jeune me disait par exemple ; «je ne me sens pas inuit car je ne bois pas, ne me drogue pas et ça ne m’intéresse pas».  Cela amène aussi une moins grande responsabilisation de la personne face à son problème étant donné que la croyance populaire fausse veut que ce soit «génétique, on ne peut rien y faire». C’est une pente très dangereuse à mon avis. 
Tout au long de leur colonisation, l’exclusion des Autochtones s’est
concrétisée par le renforcement de leur différence avec le monde des
Blancs, notamment dans leurs habitudes de consommation.
Diviser, différencier, déresponsabiliser pour mieux régner? 

Rien n'est jamais aussi simple qu'il paraît et il est plus facile d'envoyer des gens en traitement plutôt que de travailler sur la pauvreté, la misère sociale et intellectuelle et les impacts de la colonisation. En ce qui concerne les centres de traitement pour se «guérir» de cette dépendance, ils ne fonctionnent pas. D'ailleurs, ce n'est même pas moi qui le dis mais l'intervenant spécialisé en addictions pour la côte de la Baie d'Hudson avec qui j'ai parlé la semaine dernière. Ces ressources ne fonctionnent pas, c'est prouvé et facilement observable pour n'importe quel intervenant. Les gens qui y vont rechutent toujours ou presque. Un des gros problèmes est le fait que suite au traitement qui est presque toujours à l'extérieur de la communauté (Montréal ou Kuujuaq), les gens reviennent dans la communauté avec le même entourage et les mêmes problèmes sans suivi ou support. Heureusement, tranquillement pas vite, des initiatives sont mises en place pour palier à ce manque. La semaine prochaine, nous aurons d'ailleurs la visite de personnes pour tenter d'en débuter un ici.

Déjà la moitié de mon séjour qui s'amorce!  Ma première semaine ici, je n'avais pratiquement personne pour m'aider heureusement que c'était assez tranquille. Une de mes collègues inuk était allée cueillir des bleuets dans un autre village. C'est une activité très populaire ici vers la fin de l'été et le début de l'automne. Les gens revendent parfois les sacs de bleuets à des prix qui varient de 15 à 40$. Bref, une partie cueillie des bleuets l'autre Dieu sait-ou, on se débrouille comme on peut dans un village ou on ne connait pas grand monde. J'ai du avouer à ma boss que j'étais seule à un moment ou j'avais à gérer une situation problématique malheureusement ce qui s'est résulté en une absence de paye pour mes collègues. Avec le recul, j'aurais peut-être du rester un peu plus floue sur leur absentéisme mais personne ne m'en a tenu rigueur comme quoi même si elles le font, elles savent qu'elles ne devraient pas? Le fait est qu'ici les travailleuses communautaires ne travaillent pas toujours et se font payer quand même... Il faut savoir que les supérieurs sont dans un autre village et que les blancs ne sont pas la pour jouer les porte-panier. Travailler au Nord parfois c'est être pris entre l'arbre et l'écorce...Cette semaine, je recommence à être sans helper et c'est difficile de travailler dans ces conditions spécialement avec des gens ne parlant pas anglais du tout!

Il y a certaines légères améliorations à Akulivik depuis mon dernier passage. Il y a une travailleuse communautaire d'engagée pour travailler sur des projets visant la sensibilisation et la prévention dans la communauté, des idées de partir des groupes de support et l'autobus scolaire qui ne fonctionnait plus depuis un an fonctionne! Il faut voir le positif dans les petites choses...!


Dans un autre ordre d'idée j'ai fait du bateau me gelant les fesses avec des inuits en t-shirt pour regarder si les filets avaient recueilli de l'Artic Char sans succès tout en restant à l’affût parce que certains des gens du village croient au Big-Foot...  Aussi, cette semaine je n'ai pas de mots pour décrire (encore, je radote) mon dégoût du gouvernement Harper qui refuse de s'intéresser aux sort des femmes autochtones disparues et tuées donc j'emprunte ceux-ci ;

«Un peuple invisible», disait le chanteur
Tellement invisible que voilà que ses mères disparaissent
Sans laisser de traces
Sans créer de drame
Sans recomptage
Comme des papillons de nuit…
Des marches de l’empereur aller simple seulement
Des impératrices volatilisées
Qui partent à la chasse sans revenir au bercail
Des alertes AMBER sans pancartes
Mortes dans l’oeuf
Sans espoir de rançon
Missing, pas de pinte de lait
Bye
On tourne la page
Terrés derrière nos TV
Gênés d’être lucides
Faudra tout de même un jour oser le dire
Si ça, c’est pas un génocide
Dites au Larousse de nous garder une pleine page
Le temps qu’on trouve les mots justes
Ici gît le Tiers-monde
Né pour un petit pain
Mort à genoux
Les deux pieds dans le pétrin
le reste de ce texte de Grantalen ici ; http://grantalen.com/wordpress/?p=642

Le 4 octobre il y a une marche qui se tiendra à Montréal au Parc Émilie-Gamelin et j'y serai probablement. Il s'agit de la 9 marche/veille officielle pour les femmes autochtones disparues et assassinées mais comme disait Gaston Miron «Ouices choses ont déjà été ditesmais je les répéterai jusqu'à ce que vous les ayez comprises»
Je vous y invite! ;)
Atsunai!

mercredi 27 août 2014

La police au Nunavik


Me voici de retour au Nord à Akulivik après 8 semaines de vacances pour un petit séjour!
Akulivik j'y étais déjà allée brièvement et j'en ai parlé un peu ici http://mimiaununavik.blogspot.ca/2013/11/akulivik-la-derive.html
J'avoue que je n'ai pas sauté de joie quand on m'a proposé d'y retourner mais j'ai vu ça comme un nouveau défi car c’est le premier village ou je serai seule c'est à dire que c'est un village ou il n'y a ordinairement qu'un seul travailleur social. On va voir comment ça se passe...Je ne sais pas si l'ambiance a changé depuis mon dernier passage mais j'en doute car le TS qui me précédait a eu deux des vitres du logement brisées par des jeunes, c'était son premier passage ici et il m'a dit «on voit qu'il y a des communautés plus «poquées» que d'autres...».

Il m’a raconté une histoire qui eu lieu cet été et je vous la raconte car je trouve que ça illustre bien le clash des cultures. Un homme se noit. Il est dans l’eau depuis 45 minutes lorsqu’on le sort donc, on s’entend qu’il est pas mal mort. La croyance traditionnelle veut qu’on le laisse en paix, la tête en bas et que si l’eau doit sortir, elle sortira. Les policiers arrivent et amènent le corps au nursing et les infirmières doivent faire des manœuvres de réanimation tout de même sur ce corps qui est resté dans l’eau 45 minutes… Les inuits ne sont pas contents de ce manque de respect envers le défunt et leurs croyances. L’homme ne se réveille pas (est-ce que ça étonne quelqu’un?)  malgré le travail des infirmières coatchées à distance par un médecin qui n’est pas présent dans le village.  Dans cette histoire, la culture n’a pas été respectée comme souvent et entendons-nous que le white way fut assez inutile...

À l'aéroport, j'ai croisé une collègue inuk d'un autre village qui m'a dit qu'un homme d'Inukjuak avait été tué par balle le mois passé par les policiers alors qu'il tenait une poêle (oui) et était agité où menaçant. Cela a créé beaucoup de ressentiment envers les policiers dans la communauté selon cette collègueet je les comprends. Je ne sais pas le fond ni la véracité de l'histoire donc je ne jugerai pas l'intervention policière et une enquête indépendante de la SQ aura lieu pour justement comprendre ce qui s'est passé et comment ça a pu déboucher en mort d'homme.
À la base, personnellement je n'ai pas un préjugé favorable envers les policiers en général mais il ne faut pas généraliser et j’admets que je ne ferai jamais le travail qu'ils font ici. Les policiers d'ici en général sont plus souvent qu'autrement blancs…

87 policiers du KRPF sont Blancs, parfois Noirs, peut-être d’une autre couleur, mais presque jamais ne sont-ils Inuits (au 1er mai 2012, ils étaient 4 sur 87). Mais ça doit être pour le bien des Inuits, direz-vous ? Eux qui ne peuvent faire ce travail. EUX qui n’ont pas l’éducation pour occuper ces postes. EUX qui ne comprennent pas comment ça marche, protéger les leurs ! ON doit les aider. Un peu comme les Belges devaient aider ces Congolais; ou les Français, ces Algériens; ou les Anglais protestants, ces Canadiens francophones chrétiens… ILS ne comprennent pas la bonne manière de faire les choses. ON doit les aider… http://www.ledevoir.com/societe/actualites-en-societe/372427/on-a-tue-steve-dery

Ils sont aussi très jeunes, inexpérimentés et en sous-effectif...
Je vous invite à lire cet article sur le travail des policiers au Nord ; http://www.journaldemontreal.com/2014/08/17/des-policiers-en-danger-dans-le-nord
Il s’agit du journal de Montréal donc je vais me permettre de critiquer un peu. Non, selon moi, le Nunavik n’est pas «particulièrement dangereux» mais oui le métier de policier l’est au nord comme au sud et il est vrai que les conditions de travail des policiers ici et les problématiques sociales les mettent plus à risque mais pourquoi on s’intéresse plus aux policiers blancs qu’aux Inuits tués par ces mêmes policiers? Pourquoi on entend rarement (sinon jamais) parler de la mort de ces inuits? Pourquoi leurs vies sont-elles moins importantes… parce qu’ils étaient en crise, en difficulté et méritaient ce qu’il leur est arrivé? Sur les 6 enquêtes décrites dans l’article 5 se sont soldées par la mort d’un homme par suicide. Si on s’intéressait à leur détresse et à une façon d’intervenir avec eu en état de crise qui ne se solderait pas par une mort d’homme?

Leur visage, ON ne le voit pas. ON voit ce qu’ON en a compris et c’est ainsi qu’ON le représente. On voit le Grand Nord, la beauté de ses paysages. On voit des chasseurs, vivant dans des igloos. On voit des alcooliques. On voit le désespoir. C’est ainsi qu’on LES voit. On voit tout ce qu’on veut, mais on ne voit pas les individus.
http://www.ledevoir.com/societe/actualites-en-societe/372427/on-a-tue-steve-dery

Les Inuits ne sont pas majoritairement violents envers les blancs ou les policiers. Ils sont violents entre eux et envers eux-mêmes...

Sur une note plus légère qu’est ce qu’on fait quand son vol pour partir en vacances est annulé pour mauvaise température et qu'on vire folle comme ce fut le cas pour moi en juillet? On se BAIGNE! Je me suis baignée à Salluit … beat that Ice bucket participants! ;) Atsunai!





mercredi 2 juillet 2014

Melting pot de départ

Ai
Je repart au sud sous peu. Depuis le début de juin, la luminosité augmente sans cesse et les nuits sont très très courtes. Le soleil se couche vers 11hrs, se relève vers 3 heures du matin et même s'il se couche à 11 heures, ça ne veut pas dire qu'il fait noir... La semaine passée j'ai vu le coucher du soleil et son lever par une nuit d'insomnie particulièrement intense. Cette clarté amène souvent les enfants à passer la nuit dehors...

Avec l'arrivée du printemps/été au Nord à Salluit est revenu en force une pratique assez désespérante chez les jeunes du villages soit le sniffing ou l'abus de substances volatiles et de solvants pour avoir un buzz. Étant la remplaçante de la TS enfance-famille actuellement, les noms d'enfants qui sniffaient se sont mis a pleuvoir sur mon bureau en plus du reste. Plusieurs campagnes de sensibilisation ont été faîtes par le passé au Nunavik pour contrer cette pratique et une inuk m'a dit que pendant quelques années c'était moins présent selon elle parce que les gens étaient plus conscients du danger que ça représente. Dès la première fois que vous essayer, vous pouvez mourir on the spot. Donc, n'essayez pas ça à la maison. Cependant, le positif dans tout cela c'est que les gens de la communauté ici sont aux aguets et que s'ils aperçoivent des jeunes en train de sniffer, ils vont en parler. Le positif c'est aussi que les policiers de la communauté ont été formés sur le sujet et savent qu'il ne faut pas faire peur aux jeunes en train de sniffer ni leur courir après car il pourrait en résulter un arrêt cardiaque (oui).  Le positif c'est qu'il y a fréquemment des messages à la radio communautaire contre cette pratique. Le positif  (?) c'est qu'une professeure aurait dit que certains enfants se moquent de ceux qui sniffent parce qu'ils savent à quel point c'est stupide et dommageable.


Les glaces sont parties depuis la mi-juin à peu près ce qui libère les eaux de Salluit et permet aux inuits de partir en expédition de chasse par canot. Le fils de mon collègue a d'ailleurs tué un phoque l'autre jour et un béluga récemment.  Il paraît qu'il y a deux ans, les bélugas étaient visibles dans le fjord de Salluit par les habitants et qu'ils tiraient dessus à même la terre ferme! Il faut dire que le béluga est un met de choix ici. Comme j'en entend déjà protester contre la chasse des bélugas par les inuits je vais redire la même chose ici que j'avais dis pour les ours polaires. Réveillez-vous parce que ce n'est pas la chasse qui met ces animaux en danger mais bien la pollution et les changements climatiques et si vous voulez vraiment vous insurger pour leur protection ce que je souhaite ardemment  faîtes-le mais en visant sur Harper qui ouvre la porte aux compagnies comme TransCanada et autres du même acabit voulant faire du forage dans des endroits clés pour les bélugas http://action2.davidsuzuki.org/fr/belugas. Les pipelines et l'exploitation pétrolière sont beaucoup plus dangereuses pour la faune et la flore que quelques inuits tuant des bélugas pour nourrir leur famille et leur communauté.

Dans un autre ordre d'idée....Savez-vous ce qu'est la violence structurelle? J'ai appris ce terme à l'université et il résonne dans ma tête ici.
La violence structurelle a été théorisée par Johan Galtung (1969) et définie comme toute forme de contrainte pesant sur le potentiel d’un individu du fait des structures politiques et économiques (« any constraint on human potential due to economic and political structures »). Ces contraintes ont pour conséquence un accès inégalitaire aux ressources, au pouvoir politique, à l’éducation, à la santé ou à la justice. Il s’agit donc de cette forme de violence produite par des institutions étatiques (un système politique discriminant) ou des pratiques sociales (une norme sociale excluante) qui empêchent des individus ou des groupes de satisfaire leurs besoins de base. http://www.irenees.net/bdf_fiche-notions-213_fr.html

La semaine passée je parlais de la violence envers les femmes et cette semaine me voici abordant la violence structurelle parce qu'elle est, selon moi, très présente envers les inuits,  pas seulement envers eux mais bon. Pourquoi malgré le fait que la population du Nunavik soit composée à 35% de jeunes de moins de moins de 15 ans n'y a-t'il pas encore de Cégep dans tout le Nunavik rendant ainsi l'accès aux études supérieures beaucoup plus difficile pour les inuits? Pourquoi la crise du logement au Nunavik perdure malgré le fait qu'il est reconnu qu'elle exacerbe les problèmes sociaux et de santé et qu'il est reconnu qu'elle a été crée par un manque d'investissement du gouvernement?   Pourquoi un sac d'oranges à la COOP coûte 12$ et qu'environ 70% des enfants inuits de 3 à 5 ans vivent en état d'insécurité alimentaire aka ont souvent faim? http://www.feedingmyfamily.org/. Je n'aborde que ces trois domaines de la vie des inuits mais je pourrais continuer longtemps...

Cette forme de violence  est un processus lent qui produit de l’inégalité, de la souffrance et peut conduire à un état de misère permanent ou à la mort. Cette violence s’auto-renforce en désamorçant les ressorts qui conduisent à la lutte contre cette exploitation en constituant une entrave à la prise de conscience de sa propre condition et à la mobilisation. Elle conduit à la violence directe ou la résignation.

En ne mettant pas plus d'efforts pour permettre aux inuits québécois et canadiens de manger à leur faim, d'avoir un logement adéquat et non surpeuplé et en ne les aidant pas à mettre en place plus rapidement des structures facilitantes pour permettre à ceux qui le désirent de réaliser des études supérieures, le gouvernement du Canada ne leur permet pas de se réaliser pleinement comme il le ferait pour un autre citoyen et, en ce sens, il fait preuve de discrimination à leur égard.
Voici mon opinion, si vous ne la partagez pas...I don't care! ;)
Sur ce... Atsunai!

                                                                                                                                                                                                          Christina, la relève!                                        

mercredi 18 juin 2014

Revenir au point de départ et frustration

Ai
Nelson Mandela a eu ces paroles sages ; «C'est en revenant à un endroit ou rien n'a bougé qu'on réalise le mieux à quel point on a changé». Je ne dirai pas que rien n'a bougé à Salluit mais bon vous comprenez l'idée! Pour ceux qui ne le savent pas, j'ai commencé mon expérience au Nord à Salluit. J'ai beaucoup appris depuis ce premier séjour sur les inuits, le travail au Nord et sur moi.
Avec moins d'un an d'expérience au Nord, je suis déjà actuellement la plus ancienne blanche aux services sociaux de Salluit! Ce n'est pas difficile vu que ma collègue actuelle vient tout juste d'arriver pour son premier séjour au Nord mais elle a déjà l'âme d'un vétéran!  Dès ma deuxième semaine je me suis assise avec le sergent de police que j'avais déjà connu de mon précédent séjour pour parler de l'amélioration de la collaboration services sociaux-police et, même moi, j'en étais surprise. Travailler au Nord, c'est apprendre sur le «tas» et faire des choses auxquelles je n'aurais pas pensé à prime abord!

Travailler au Nord me rend aussi parfois pleine de colère, peut-être que je me répète...
La plupart du temps, j'arrive à gérer cette colère et la transformer en positif, en collaboration, en écoute, en compréhension et à passer par dessus pour ne pas me laisser envahir mais elle est quand même la.
                                                                                               murale de Fanny Aishaa
Depuis que je travaille au Nord, je vois et j'entend ma part d'histoires de femmes battues, violées et j'entend des histoires de femmes tuées, disparues. Lorsque je sors d'une intervention avec une de ces femmes ou je dois me retenir de pleurer, je suis en colère parce qu'elle n'est une parmi tant d'autres...
Et aussi parce que depuis 2012, l'assemblée des premières nations, Amnistie Internationale, l'ONU et autres organisations réclament une commission d'enquête nationale sur les femmes autochtones disparues ou assassinées et que le gouvernement continue de refuser. En étant femme autochtone ou inuk, tu part bien mal dans la vie parce que selon les statistiques tu as 3 fois plus de chances de subir de la violence qu'une blanche et oups si tu meurt ou disparaît c'est beaucoup moins sur qu'on retrouvera le coupable...
Selon les données recueillies par les Sœurs par l’esprit de l’Association des femmes autochtones du Canada, 1186 femmes autochtones ont disparu ou ont été assassinées au Canada entre 1980 et 2012. Leurs chiffres révèlent aussi que la situation s’est aggravée au cours des dix dernières années.
http://www.ffq.qc.ca/2014/06/reclamons-une-commission-denquete-nationale-sur-lassassinat-et/
Je me relisais et j'en parlais déjà en octobre sauf que le nombre était estimé à 600 femmes...Qu'on se le dise, le Canada n'est pas le pays de l'égalité mais on dirait que certains s'en contrecrissent comme notre gouvernement conservateur actuel... Ces femmes représentent 4% des femmes canadiennes mais 16% des femmes assassinées et 12% des femmes disparues et on n'en parle pas ou si peu donc me voici en train de le faire...


Sur une note plus légère, voici les photos de ma collègue de nos récentes découvertes culinaires. J'ai découvert le Pitsik (poisson séché) qu'une collègue inuit m'a donné. C'est du poisson cru qu'ils font sécher au soleil et c'est délicieux. J'ai aussi eu la chance (?) de manger un oeuf de goéland...Disons que je ne retenterai pas l'expérience... Atsunai!